Souvenirs du symbolisme
Ce qui ne nous parle plus guère dans la poésie symboliste : le goût du lexique rare, le culte de l’antique, le recours à la mythologie ; tout un appareil dont Mallarmé sut tirer de précieuses miniatures mais qui entre des mains moins expertes sent la pacotille.
Ce qui nous touche encore dans la poésie symboliste : un art de la suggestion obtenue par les moyens (apparemment) les plus simples.
Combien de ratures pour aboutir à ce quatrain ?
La nuit d’ombre, de soie et d’or
Du fond du silence est venue
Et l’automne est si tiède encor
Que tu pourras t’endormir nue.
— Henri de Régnier
Poème cité par Michel Bulteau dans le Club des longues moustaches (Quai Voltaire, 1988) : évocation d’un groupe d’écrivains à belles bacchantes qui partageaient l’amour de Venise, un dandysme sans illusions et un certain penchant à la mélancolie, né du sentiment d’être en porte-à-faux avec leur époque : Henri de Régnier, Jean-Louis Vaudoyer, Edmond Jaloux, Émile Henriot, Eugène Marsan, Francis de Miomandre.

Super-nouvelles
The enquiry into the death of the young woman found in the cellar at Burnt Oak Road proceeded on its routine course. The Press, of course, seized on it avidly. If, as Miss Rose Macaulay says, women are news, and by that presumably meaning live women, murdered young women are super-news. Young women, in the eyes of Fleet Street, are invariably romantic, and to be murdered in a suburban villa and buried under its cellar floor is obviously the quintessence of romance. Banner headlines flaunted their boldest type over double-column stories for just seven times as long as would have been the case if the victim had been an unnewsy young man.
Anthony Berkeley, Murder in the Basement (1932).
British Library Crime Classics, 2021.
Collectionnite

Bargain Hunt, BBC One.
Au coin des excentriques anglais. Ce monsieur collectionne les boutons de manchettes. Il en possède vingt-sept mille paires. Cela le remplit de joie. Christina Trevanion n’en revient pas. Nous non plus.
Comme en un songe
Sous la plume de Borges, l’histoire et la littérature se mettent à ressembler à un conte de Borges.
Comme tous les hommes, les peuples ont leur destin. Avoir et perdre est le sort commun des peuples. Être sur le point de tout avoir, et tout perdre, est le tragique destin allemand. Plus étrange et plus semblable aux songes est le Scandinave. Pour l’histoire universelle, tout se passe comme si les guerres et les livres scandinaves n’avaient pas existé. Tout demeure dans l’isolement. Rien ne laisse de traces, comme si ces choses n’arrivaient que dans un rêve, ou dans ces boules de verre que scrutent les voyants. Au XIIe siècle, les Islandais découvrent le roman, l’art de Cervantes et de Flaubert ; cette invention est aussi secrète, aussi stérile pour le reste de l’univers que leur découverte de l’Amérique.
Jorge Luis Borges et María Esther Vázquez,
Essai sur les anciennes littératures germaniques.
Traduit de l’espagnol (Argentine) par Michel Maxence.
Christian Bourgois, 1966, rééd. 10/18, 1970.

Profession de foi

Antiques Road Trip, BBC One
Une filiation
Les filiations littéraires sont imprévisibles. De passage à Londres à l’automne 1910, Maurice Maeterlinck rend visite à J.M. Barrie et lui dit toute l’admiration qu’il porte à Peter Pan. Au terme de leur long entretien, le dramaturge belge laisse une trace de son passage en écrivant au crayon noir sur un lambris du bureau de Barrie :
« Hommage au père de Peter Pan, grand-père de l’Oiseau bleu. »
(Source : François Rivière, J.M. Barrie, l’enfant qui ne voulait pas grandir, Calmann-Lévy, 1991.)

La pensée des poètes
Les grandes chaleurs sont instructives. On découvre enfin grâce à elles l’utilité pratique de la pensée des poètes.
(Photos prises chez la veuve d’un poète.)

