Ce qui ne nous parle plus guère dans la poésie symboliste : le goût du lexique rare, le culte de l’antique, le recours à la mythologie ; tout un appareil dont Mallarmé sut tirer de précieuses miniatures mais qui entre des mains moins expertes sent la pacotille.
Ce qui nous touche encore dans la poésie symboliste : un art de la suggestion obtenue par les moyens (apparemment) les plus simples.
Combien de ratures pour aboutir à ce quatrain ?
La nuit d’ombre, de soie et d’or
Du fond du silence est venue
Et l’automne est si tiède encor
Que tu pourras t’endormir nue.— Henri de Régnier
Poème cité par Michel Bulteau dans le Club des longues moustaches (Quai Voltaire, 1988) : évocation d’un groupe d’écrivains à belles bacchantes qui partageaient l’amour de Venise, un dandysme sans illusions et un certain penchant à la mélancolie, né du sentiment d’être en porte-à-faux avec leur époque : Henri de Régnier, Jean-Louis Vaudoyer, Edmond Jaloux, Émile Henriot, Eugène Marsan, Francis de Miomandre.