J’étais fascinée par l’étrangeté de mon travail. Je ne prenais pas de notes du tout, mais presque chaque soir je travaillais à mon roman et les idées de la journée se rassemblaient pour former ces deux personnages féminins que j’ai créés dans Warrender Chase, Charlotte et Prudence. Non que Charlotte fût entièrement fondée sur Beryl Times, bien loin de là. Et ma Prudence très âgée n’avait rien à voir avec une réplique de la maman de Sir Quentin. La méthode par laquelle je créais mes personnages était instinctive, c’était la somme de mon expérience globale d’autrui et de mon propre être en puissance ; et il en a toujours été ainsi. Parfois je ne rencontre réellement un personnage que j’ai créé dans un roman qu’un certain temps après que le roman a été écrit et publié. Et en ce qui concerne mon personnage de Warrender Chase lui-même, j’en avais déjà dessiné les grandes lignes de manière définitive longtemps avant d’avoir rencontré Sir Quentin.
Muriel Spark, Intentions suspectes (Loitering with Intent, 1981).
Traduit de l’anglais par Alain Delahaye.
Fayard, 1983.
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